Les besoins en semences et plantes sauvages s'étoffent
La jeune pépinière de plantes sauvages Floridée'O, installée dans l'agglomération rennaise (35), tire son épingle du jeu grâce à son dynamisme et à un contexte qui permettent une augmentation et une diversification de la production.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Depuis sa création en 2011, la pépinière Floridée'O, spécialisée dans les plantes sauvages locales et installée sur la commune de Bruz, au sud de Rennes, poursuit son développement. Elle s'apprête même à agrandir sa surface de production, pour répondre à une demande qui progresse régulièrement et que l'on peut mettre en relation directe avec un contexte favorable et une diversification de sa clientèle.
Favoriser des aménagements durables
C'est dans le cadre d'un projet de reconversion professionnelle et après avoir suivi le cursus d'éco-concepteur à la Maison familiale rurale (MFR) de Saint-Grégoire (35) que Thao Ngo décide de créer une pépinière de plantes sauvages locales pour disposer d'une palette végétale en accord avec les principes d'aménagements écologiques qu'elle a appris lors de sa formation. Le terrain sur lequel la pépinière s'est installée est propice au projet : il dispose d'une diversité de milieux permettant de cultiver les plantes dans un environnement adapté à leurs origines : zones humides, secteur ombragé à l'abri d'une ancienne haie bocagère, prairies sèches et ensoleillées... En outre, du fait qu'il soit resté en friche durant plusieurs années, il peut faire l'objet d'une certification « agriculture biologique » immédiate. Dès le départ, la structure s'entoure de scientifiques locaux, Louis Diard (botaniste, auteur de l'Atlas de la flore d'Ille-et-Vilaine), Bernard Clément (président du conseil scientifique du conservatoire botanique national de Brest) et Jacques Haury (enseignant-chercheur à Agrocampus Ouest Rennes). Leur appui est précieux pour encadrer toutes les actions de la pépinière en faveur de la connaissance et de la valorisation de la flore sauvage du massif armoricain. Il apporte en particulier des conseils pour sélectionner la palette à cultiver, trouver les zones de récoltes et mettre en oeuvre des techniques de multiplication adaptées.
Une diversification de la clientèle
La pépinière a démarré en 2011 avec une clientèle répartie à parts égales entre les particuliers d'un côté, les collectivités territoriales et paysagistes de l'autre. « Elle s'est constituée grâce à sa présence dans les fêtes des plantes et sur les marchés locaux, ainsi que par le biais du réseau des stagiaires et formateurs professionnels des formations éco-concepteurs et éco-jardiniers de la MFR de Saint-Grégoire », explique Thao Ngo, fondatrice de la pépinière. Puis le réseau s'est élargi, par le biais des anciens clients, du site Internet mais aussi des animations et formations que la dirigeante organise pour faire partager sa passion auprès des écoles, des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ou encore des prisons. Aujourd'hui, le chiffre d'affaires se répartit ainsi : 60 % en provenance de collectivités territoriales (communes de Rennes Métropole, Lorient agglomération - 56, villes de Vannes - 56, Lanester - 56, Saint-Brieuc - 22, Quimper - 29, conseil départemental d'Ille-et-Vilaine, Conservatoire du Littoral...), 20 % de grands groupes privés et organismes de recherche (Muséum, Inra, Thalès, Yves Rocher, Ligue de protection des oiseaux...), 20 % de paysagistes et particuliers. L'essentiel du marché est régional mais du fait qu'il existe encore peu de producteurs spécialisés sur le marché des plantes sauvages sur le territoire national, l'entreprise est amenée à répondre à certaines demandes en dehors de ce territoire, lorsque la palette dont elle dispose peut convenir, par exemple en Île-de-France, dans le Nord, en Vendée ou en Loire-Atlantique. « Ces dernières années, nous avons pu constater une évolution favorable pour les professionnels oeuvrant comme nous dans une démarche de conception et de gestion durable des territoires. Les projets se diversifient et ne concernent pas seulement des programmes de restauration de milieux fragilisés ou de compensation écologique lors de grands travaux (routes, lignes de trains à grande vitesse...). On trouve également des collectivités territoriales engagées dans une démarche environnementale globale qui souhaitent mettre en place des massifs fleuris d'un nouveau genre, basés sur des plantes locales esthétiques, écologiques et rustiques (seules ou en mélanges avec des espèces horticoles) ou des espaces intégrant des plantes médicinales ou comestibles. Sans compter les demandes de paysagistes et de particuliers pour des aménagements de jardins privés », explique Axel Équilbey, concepteur paysagiste et conseiller pour la pépinière.
Autre axe de développement complémentaire, celle de l'expérimentation et de l'innovation. Floridée'O collabore par exemple avec la société morbihannaise Svitec pour un projet portant sur la conception d'un système de dépollution des eaux de lavage des camions d'une société de transports par le biais de plantes sauvages locales, incluant la recherche des moyens de recyclage des végétaux utilisés pour la phytoépuration.
Augmentation de la production, élargissement de la gamme
La diversification des types de projets auxquels la pépinière répond a indéniablement entraîné une augmentation de la production. En cinq ans, elle a pratiquement été multipliée par dix, avec une forte augmentation de la demande de plantes en racines nues pour les aménagements de génie écologique ou de phytoépuration de grande ampleur. D'ailleurs, pour anticiper des demandes qui peuvent arriver en urgence, la pépinière essaie de toujours disposer d'un petit stock d'une centaine d'unités pour les espèces les plus demandées. La récolte des plantes sauvages est réalisée sur des milieux peu altérés préalablement, identifiés avec l'aide des scientifiques et des propriétaires concernés. Les prélèvements se font sur des populations saines qui présentent des caractéristiques génétiques bien spécifiques. Ce patient travail de collecte contribue à la conservation de la diversité génétique des populations, en respectant les milieux et les plantes protégées, interdites à la cueillette. Les boutures ou graines récoltées sont ensuite mises en culture et multipliées au sein de la pépinière d'abord sous serres puis en pleine terre. Les plantes ne subissent pas de forçage, ni d'arrosage, sauf pour le démarrage et en cas de nécessité absolue. Selon les espèces et la nature du projet, les végétaux sont commercialisés en godets, en racines nues, sous forme de semences pures ou en mélanges. Les mélanges de graines sont réalisés sur mesure, après analyse des conditions pédoclimatiques du chantier. « La diversification de la production se fait au bénéfice de la biodiversité locale et en quelques années le site d'exploitation est devenu un véritable jardin de Noé et suscite l'intérêt de naturalistes et de chercheurs du Muséum national d'histoire naturelle de Paris », explique Thao Ngo. Avant le démarrage de l'activité, un inventaire de la faune, de la flore, et de l'habitat avait été réalisé. Il est régulièrement remis à jour.
Yaël Haddad
Radeaux Composés de plantes phytoépuratrices locales, les radeaux peuvent être installés chez un particulier dans une mare.
Séchage La récolte des graines se fait à partir du moment où les plantes sont complètement sèches.
Au premier plan à gauche, l'emplacement de la nouvelle serre financée par crowdfunding et au fond, l'autre tunnel qui sert pour le séchage des plantes ou la phase de multiplication.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :